Fact'Ory

À l'origine des faits


« Chemtrails » #5 : France-Soir, le grand saut sans parachute

Alors que Barnérias réalise une entrée timide mais attendue dans la théorie des « chemtrails », France-Soir fait le choix du fracas. Lors d’un récent entretien avec Giuseppe Tritto, le rédacteur en chef du service de presse en ligne – Xavier Azalbert – déroule le tapis rouge aux « chemtrails ». Dans un mélange des genres détonnant : 5G, HAARP, armes à énergie dirigée, « médecine quantique« , « chemtrails » ou encore ondes électromagnétiques, le Rubicon est franchi de manière soudaine. Fact’Ory revient sur cet entretien dans lequel France-Soir, sans apporter la moindre contradiction, valide une théorie totalement infondée.

Note à l’intention des lecteurs – Dans cet article nous nous intéresserons uniquement à la partie traitant des « chemtrails » (42’30 à 56’30)


Une entrée par la petite porte

Pas une seule mention. France-Soir a su se faire discret jusqu’à présent sur le sujet. Il faut remonter à 2018 dans un article de Pierre Plottulicencié pout motif économique par la direction de France-Soir avec quatre autres journalistes en septembre 2019 -, évoquant le dernier ouvrage de Marie Peltier sur la « mécanique complotiste », pour retrouver le terme. Mais depuis, le formuler à l’écrit semble rester un tabou, une ligne à ne pas franchir.

Premier changement de cap à partir de juillet 2022. Depuis, sur une base régulière, l’ancien quotidien publie des articles sur la géo-ingénierie et l’ensemencement des nuages. L’un d’eux est déjà annonciateur de ce qui arrivera. Publié par X. Azalbert en mai 2023, le texte montre déjà un certain parti pris : « Et si l’on injectait des aérosols dans la stratosphère, tiens, pour voir ? Théorie du complot ? ». Un appel du pied à peine dissimulé à son lectorat, quand on sait que personne tant dans la communauté scientifique ou dans les médias – fustigés lourdement dans l’article – n’a qualifié la géo-ingénierie de « théorie du complot ». Surfant sur l’agitation des réseaux sociaux suite aux inondations dévastatrices d’avril 2024 dans la péninsule arabique, France-Soir publie deux articles, l’un sur l’ensemencement des nuages, l’autre sur la géo-ingénierie [ce dernier ayant été largement plagié sur un article du Monde comme nous le montrions le 18 juin dernier].

Puis soudain, suivant un mouvement généralisé, Azalbert décide le 21 juin de formuler de vive voix et pour la première fois le terme « chemtrails« . Non pas comme une théorie mais bien comme « une réalité« . Trois publications sur X, un article sur France-Soir, republication d’un post de Aurélien Poirson-Atlan – plus connu sous le pseudonyme Zoé Sagan -, la machine est lancée.

Capture d’écran sur X réalisée le 27 juin 2024

Cependant, à l’image du reportage de Pierre Barnérias, le succès n’est pas au rendez-vous. Alors que la publication originale peine à dépasser les 500 likes sur X, France-Soir se décide à republier une compilation d’extraits de l’entretien, centrée autour des « chemtrails« , le 26 juin 2024. Echec relatif : la barre des 500 likes n’est pas franchie.


Des précautions bien vites balayées

De prime abord, l’entretien se veut distancié. Il n’est pas question de donner plein crédit à ces théories. Non, l’objectif annoncé en introduction est de répondre aux « questions que se posent les lecteurs » dans lesquelles sont présentes « beaucoup de théorie du complot », des « sujets qui sont sensibles » abonde Azalbert.

« On va essayer justement d’y amener un peu d’ordre, d’ordre dans les idées afin de ne pas avoir de désordre dans l’information et de ne pas justement passer la ligne rouge de la désinformation, de dire ce qui est possible, de ce qui n’est pas possible »

Xavier Azalbert, Entretien Essentiel, France-Soir, 21 juin 2024

Nous voilà rassurés ! La prudence est de mise… au placard. Les faits rattrapent vite les annoncent de façade, à commencer par la présentation de l’intervenant. Tout ce que nous dira l’entretien sur ce personnage est son nom et sa « spécialité ». Joseph – de son prénom italien Giuseppe – Tritto est présenté comme « spécialiste des nanotechnologies » (mais comme « Chirurgien et président du WABT » un an plus tôt). Silence radio sur son CV. Et pour cause, l’invité n’a aucune expertise dans les domaines abordés dans l’entretien. Rien qui n’a trait aux sciences de atmosphère, à la climatologie, à l’aéronautique, à l’électromagnétisme ou à la chimie. En réalité, Giuseppe Tritto est un urologue et andrologue passé un temps au service d’urologie de l’hôpital Saint-Antoine à Paris. Dans un autre entretien donné cette fois-ci à Pierre Barnérias pour Citizen Light, le professeur se définit de la sorte :

«  Je suis urologue et andrologue et président de l’Académie mondiale des technologies médicales » (la WABT, qui aujourd’hui semble être une coquille vide comme en témoigne son site abandonné). « En plus je suis expert en nanotechnologie. J’ai été professeur en micro nanotechnologie à la Aston University à Birmingham et après à la Brunel University à Londres et j’ai eu la chaire de nanomédecine à la Amity University à New Delhi », précise-t-il.

Giuseppe Tritto, « Révéléation #3, « Le SARS-CoV-2 est bien une arme biologique toxique !« , Citizen-Light, 4 mai 2023

De nombreux titres pour une empreinte discrète. Son h-index est de 2 – cumulant un total de 75 citations sur l’ensemble de sa carrière selon ResearchGate – et quasiment absent des recherches sur les sites des universités d’Aston, Brunel et Amity. Nulle précision également de ses prises de positions sur la pandémie de Covid-19, dont le livre « Cina Covid-19 : la chimera che ha cambiato il mondo », sorti au milieu de l’année 2020 aux éditions Cantagalli, expliquait que le SARS-CoV2 est une chimère créée en laboratoire à partir d’un virus de chauve-souris et d’un virus de pangolin. Des précisions qu’il aurait été de bon ton d’apporter pour permettre au lecteur d’évaluer la crédibilité de l’intervenant.

Peu importe après tout, il l’assure : « j’ai tous les documents que je peux vous donner ». Azalbert confirme : « Tout ce que vous êtes en train de me dire est sourcé ». Voilà de quoi nous permettre d’avoir confiance en ses déclarations. Nouvelle déception. Que ce soit dans l’entretien ou dans l’article affilié, aucune source n’est citée. Questionné par cette absence de transparence, Fact’Ory a tenté de joindre à plusieurs reprises – à la fois sur X et par message électronique – la rédaction de France-Soir pour disposer de ces documents et sources. Nous n’avons à ce jour toujours pas reçu de réponse.

Capture d’écran de l’entretien réalisé à 55’25

Malgré des « sujets qui sont sensibles », Azalbert déploie le tapis rouge aux propos de Joseph Tritto. Une heure d’entretien durant laquelle le journaliste ne questionnera jamais le scientifique sur l’origine de ses sources, leur véracité. Le contradictoire est également aux abonnés absents, à l’exception d’une légère précision lorsque Tritto évoque le fait que la Seconde Guerre mondiale a surtout eu lieu « en Europe et au Japon ». « Il y avait un peu l’Afrique du Nord, quand même » corrige le directeur de France-Soir. Pour le reste, il validera les propos de l’urologue allant jusqu’à indiquer, à deux reprises [time code : 44’07 et 44’52] que « c’est une réalité ». Un entretien bien peu regardant des bonnes pratiques déontologiques. Quid de « l’esprit critique, la véracité, l’exactitude, […] l’impartialité« , « piliers de l’action journalistique » ? Quid de « la non vérification des faits » considérée comme une des « plus graves dérives professionnelles » selon la Charte d’éthique professionnelle des journalistes ?

Capture d’écran de l’entretien à 44’07

Plus avant encore, Xavier Azalbert surenchérit en apportant, comme nous le verrons par le suite, des informations non vérifiées et ne prenant aucune distance critique vis-à-vis des sujets abordés. Ainsi, à plusieurs reprises, il prendra les devants complétant les propos de Tritto. À aucun moment il ne sera fait mention d’une théorie au sujet des « chemtrails ». Bien au contraire, Azalbert, prenant fait et cause, les définit sans conditionnel, sans prudence aucune. Les sous-titres de la vidéo sont, à ce titre, parfaitement illustratif de l’absence totale de précaution. Le terme « chemtrail » y est indiqué sans parenthèse, donnant de facto une validité au terme.

Capture d’écran de l’entretien à 48’15

À l’inverse, lorsque la théorie n’est pas validée, elle est défendue à travers une attaque en règle des journaux et « médias mainstreams » :

« Parce que quand on regarde les journaux, quand on écoute les médias mainstream, 80% du temps, je dirais, ou presque 100% du temps, on dit : quand vous parlez des chemtrails, c’est complotiste. On n’en parle pas, ça n’existe pas. Quand vous parlez de HAARP, ça n’existe pas. »

« Vous êtes en train de dire que ça existe. Donc déjà, il y a une déconnexion entre la compréhension des gens et donc il y a un problème d’information parce que le risque perçu par vous, parce que vous le comprenez, le risque perçu par moi, parce que j’essaie de comprendre, est totalement différent de celui qui est désinformé en lui disant : ce risque n’existe pas »

Xavier Azalbert, « Entretien Essentiel », France-Soir, 21 juin 2024


« On est un peu […] dans un flou artistique »

Communication lacunaire, principe de précaution absent, transparence et contradiction oubliées. Pour autant, a-t-on passé « la ligne rouge de la désinformation » lors de cet entretien ? Les premiers éléments sont peu rassurants. La question des « chemtrails » n’est pas encore abordée que, déjà, les informations deviennent folkloriques. On y apprend que « dans la partie basse de l’ionosphère […], tu as les avions commerciaux qui tournent dans ces zones-là« . Rappelons à toute fin utile que l’ionosphère est une « couche de l’atmosphère caractérisée par une ionisation partielle des gaz » située entre 80 et 600km d’altitude.

Le record d’altitude pour un avion de chasse a été réalisé en 1977 par un MiG-25, atteignant 37 650m. Pour les avions de ligne à réaction, l’altitude de croisière se situe « en moyenne entre 30 000 et 40 000 pieds, soit « entre 9 200 et 12 200 mètres au-dessus du niveau de la mer » indique Futura Sciences. Les jets privés, eux, peuvent culminer à 15 500 mètres, loin, très loin des 60km. M. Tritto évolue loin de sa zone de confort, on le sent.


« Chemtrails » : un essai de définition selon France-Soir

Rentrons dans le vif du sujet : la théorie des « chemtrails » telle que décrite lors de l’entretien. À 48’15, M. Azalbert explique :

« Les chemtrails, ce sont ces nuages, ces fumées qu’on voit dans le ciel »

Xavier Azalbert, directeur de la publication du site France-Soir

Vaste programme… On comprendra plus tard qu’il est fait référence à « ces avions qui passent sur les différentes régions, dont nous avons tellement de photos prises tous les jours« , selon l’urologue. Ces « fumées » donc sont composées de « nanoparticules » à base de « métaux lourds », voire même de « mercure » surenchérit Azalbert. Là où les deux hommes différent de ce qui est régulièrement mis en avant par les différents partisans de la théorie c’est dans les objectifs imputés à ces « injections ». Le « weather shield« , tel qui est qualifié par Tritto, a une double fonction : arrêter les lasers – les « armes à énergie dirigée » – situés dans la haute ionosphère en offrant un « système de protection […] au travers des nuages » ; créer localement les conditions pour « contrôler le temps » et ainsi « se protéger des risques« . La discussion consistera alors à illustrer l’idée d’un contrôle de la météo à des fins agricoles, surfant sur l’éternelle confusion entre ensemencement des nuages et « chemtrails ».


« L’ionisation » en France et en Italie

Après avoir évoqué le cas des inondations meurtrières à Dubaï, qualifiées de « gag » (sic) par le professeur Tritto, Xavier Azalbert ouvre la discussion en indiquant qu’il « y a des gens qui veulent protéger les cultures. Donc, on fait déjà de l’ionisation », en France et en Italie. Les deux hommes se mettent alors d’accord : « c’est ce qu’on appelle les chemtrails ».

Or, il n’existe à ce jour aucun programme d’ensemencement des nuages en Italie. Seuls ont eu lieu des tests dans les années 80 et 90 afin d’évaluer le potentiel de cette pratique dans les régions du Sud (Pouilles, Basilicate, Sicile, Sardaigne). Commandée par le Ministère des Politiques agricoles, alimentaires et forestières entre 1988 et 1994 et discuté par la 9e commission permanente , l’étude avait conclu que les essais « ne montrent aucun effet d’ensemencement perceptible lors de l’expérience d’amélioration de la pluie dans les Pouilles ».

En France, en revanche, la pratique est commune depuis les années 1950. Promue par l’Association Nationale d’Etude et de Lutte contre les Fléaux Atmosphériques (ANELFA), elle cherche à protéger les cultures de la grêle en introduisant « artificiellement dans les nuages des noyaux glaçogènes d’iodure d’argent de façon à augmenter le nombre de cristaux de glace, et à réduire en conséquence la dimension des grêlons : ceux-ci tombent alors plus lentement et fondent en totalité ou en partie avant d’atteindre le sol » peut-on lire sur son site. Cette pratique est réalisée à l’aide de générateur à vortex au sol qui « dispersent les noyaux glaçogènes d’iodure d’argent aux racines des courants ascendants des futurs orages« . Pas de « traces chimiques », pas de photographies d’avions zébrant le ciel.

Sur la question de l’ionisation, le directeur de France-Soir semble s’emmêler les pinceaux entre les tests d’ensemencement des nuages réalisés en Arabie Saoudite et au Royaume-Uni et les pratiques de l’ANELFA. Afin de rendre plus efficace une méthode à l’efficacité très relative, des tests d’ensemencement ont été réalisés à l’aide de drones. Par décharges dans les nuages, les scientifiques espèrent « favoriser la coalescence des gouttelettes d’eau, lesquelles deviendraient alors assez lourdes pour tomber au sol. En modifiant les charges du nuage, les scientifiques espèrent ainsi diminuer les répulsions électrostatiques entre gouttelettes en vue d’accélérer leur croissance » précise le Science Post en mai 2021.

Schéma du procédé d’ionisation, dans Giles Harrison et al., Journal of Atmospheric and Oceanic Technology 38, 1, 2021

« Le système américain de chemtrail » fourni à l’Italie

De 47’50 à 48’15 puis à nouveau entre 50’00 à 50’40, M. Tritto affirme catégoriquement que le « dernier gouvernement Berlusconi« , « en 92 ou 96 » précise-t-il, a signé un accord bilatéral avec « l’armée américaine, pas le gouvernement américain, de l’utilisation des chemtrails pour le contrôle de l’agriculture en Italie« . Cet accord consistait, selon Tritto, à un transfert de technologie donnant à l’Etat italien « l’autorisation d’utiliser le système américain de chemtrails« .

À cette affirmation, plusieurs problématiques. Silvio Berlusconi a été à deux reprises à la tête du gouvernement italien en tant que président du Conseil : la première de 1994 à 1995, la seconde de 2001 à 2006. Il existe donc un décalage de presque dix ans entre la supposée signature et le dernier gouvernement Berlusconi. Que ce soit en 92 ou en 96, celui-ci n’était pas en fonction. D’autre part, aucune mention n’est faite d’un tel accord, ni dans les documents officiels, ni les documents déclassifiés. Ce qui pose la question de la source du professeur italien. Après investigation, il s’avère que cette affirmation repose sur une interprétation erronée d’une question posée par le parlementaire Sandro Brandolini le 1 octobre 2008 au Ministre de la défense italienne (question 4/01193). Dans cette question écrite au sujet des « chemtrails« , le député demande :

« Est-il vrai qu’en 2003 un traité a été signé entre les États-Unis et l’Italie sur les études météorologiques et que les vols militaires ont triplé depuis cette date »

Sandro Bradolini, 1 octobre 2008, question 4/01193 au Ministre de la Défense

Une information pourtant publique de longue date. En effet, les Etats-Unis et l’Italie sont engagés dans une coopération bilatérale depuis 1988 sur les questions technologiques et scientifiques. En avril 2001, cette coopération a été renforcée dans le domaine climatique avec un accord signé entre les États-Unis et l’Italie. Lors de cette session intitulée « États-Unis et Italie sur le changement climatique – science et technologie« , les participants ont discuté de « la recherche sur le changement climatique et les technologies à faible émission de carbone« . Signé le 16 juin 2001 entre George W. Bush et Silvio Berlusconi, l’accord biennal a été réitéré en 2003. Cette coopération s’est, entre autre, intéressée à faire « progresser [la] compréhension des effets des aérosols sur les propriétés des nuages ​​et le forçage climatique« , aérosols dont on connaît le potentiel sur le rayonnement solaire. Pour autant, l’accord n’inclut pas de transferts de technologie d’ensemencement des nuages, et encore moins de « système de chemtrails« .

Ce n’est pas la première fois qu’un député italien interpelle le gouvernement au sujet des « chemtrails« . Depuis 2003, ce sont, a minima, 14 questions parlementaires – selon le recensement réalisé par un blog partisan de la théorie – qui ont été adressées à différents ministères. Face à l’insistance de ces déclarations, plusieurs réponses ont été apportées :

  • Le 13 novembre 2006, Pecorario Scanio, alors ministre de l’Environnement, répond par une déclaration détaillée de 5 pages (pp.214-219) dont la conclusion précise que « quoi qu’il en soit, il convient de souligner qu’il n’existe aucun élément permettant d’émettre une hypothèse sur une quelconque spécificité des phénomènes de sillage pour le ciel de Sardaigne« .
  • Le 15 janvier 2009, Ignazio La Russa, ministre de la Défense, répond à la question de Bradolini (n°4/002820). « L’Armée de l’Air, qui en 2003 n’a signé aucun accord avec les États-Unis sur ce problème spécifique, n’a pas – comme l’affirme à tort – « triplé les vols militaires », mais a au contraire réduit, depuis l’année susmentionnée à aujourd’hui, l’activité aérienne de ses avions d’environ 15 pour cent » conclut-il.

Tritto se fait ainsi l’écho déformant d’une longue tradition italienne d’interrogation sur la question des « chemtrails« . Interrogations qui selon lui ont menées « à faire les chemtrails la nuit pour éviter que les personnes prennent des photos de tout ça« . Ce mythe d’un changement des périodes « d’épandages » est déjà visible dans des blogs partisans dès 2003. Pour autant, encore aujourd’hui, les traînées de condensation persistantes restent photographiées en plein jour dans la région d’Ombrie.

Des prélèvement directement dans les « chemtrails » ?

Afin d’étayer ses propos, l’urologue avance une pièce maîtresse : les « chemtrails » ont pu être déterminés grâce à des prélèvements.

« Il y a des personnes qui ont envoyé des drones à ce niveau-là, qui ont pris des particules. Donc nous connaissons maintenant, pour certaines région d’Italie, la composition des particules qui sont suspendues là dans ces chemtrails »

Joseph Tritto, Entretien Essentiel, France-Soir, 21 juin 2024, à 53’30

À l’origine de cette déclaration, un blog – Tanker Enemy – tenu par un certain Rosario Marcianò. L’habitant de Sanremo, en Ligurie, a effectué des opérations de « prélèvements » à l’aide d’un drone DJI Phantom 4. Limité à une autonomie de 30 minutes et une hauteur maximal de 6 000m, on comprend mal comment un drone pourrait aller jusqu’au niveau des traînées de condensation persistantes qui se situent généralement aux altitudes de vol de croisière (au delà des 8km). Les images tournées avec son drone montrent d’ailleurs que celui-ci se trouve à 1 865 mètres (avec un départ indiqué à 1 200 mètres au dessus du niveau de la mer)… Notons que toutes les vidéos (1, 2, 3) réalisées par Marcianò ne permettent pas de distinguer de traînées de condensation persistantes au moment des vols.

Cela n’empêche pas l’auteur du test d’être catégorique. Preuve à l’appui, il partage une série de deux photographies montrant le résultat d’un test acheté sur un site américain – Osumex – spécialisé dans la vente de compléments alimentaires et de kits de détection de métaux lourds (destinés à l’analyse des urines et de la salive). Les couleurs affichées indiquent la potentielle présence de métaux tel que du mercure, du cadmium ou encore du manganèse.

Quant à la méthode de prélèvement, nous ne pouvons qu’être circonspects… Au début d’une vidéo intitulée « Primi prelievi d’aria in quota tramite drone« , le dispositif artisanal consiste à fixer un ventilateur de processeur d’ordinateur sur la grille d’une enceinte Clarion. Disposé à l’arrière du ventilateur, un petit bac, dans lequel est déposé du coton, est censé collecter l’air ambiant.

Autre détail intéressant : pour pouvoir activer son système, le bloggeur est obligé d’allumer le ventilateur avant le décollage du drone (visible en début de vidéo). Ainsi l’échantillon a pu être dès le départ contaminé – entre autres problématiques – par la poussière au sol soulevée par le drone. Très loin de la méthode scientifique, l’expérience est à l’image des approximations présentes dans cet « Entretien Essentiel ».


Conclusion

Loin des objectifs de nuance affichés, l’entretien du professeur Giuseppe/Joseph Tritto est en réalité un plaidoyer sans nuance de la théorie des « chemtrails« . Préférant s’attaquer aux médias qui dénoncent l’incohérence et le caractère infondé de cette théorie, Xavier Azalbert tente, en vain, de convaincre son auditoire en cumulant les approximations, les fausses informations et les spéculations en tout genre : la ligne rouge de la désinformation est franchie. Une entrée en matière déroutante et loin des standards éthiques d’un journalisme digne de ce nom.



2 réponses à « « Chemtrails » #5 : France-Soir, le grand saut sans parachute »

  1. […] lors d’un entretien avec Giuseppe/Joseph Tritto. Interview qui fera l’objet d’un nouvel article à venir de notre série sur cette […]

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  2. […] « shield » via les « chemtrails » lors de son entretien chez France-Soir : un emprunt direct au « témoignage » de Blue Jay. Une notoriété dont […]

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